Photos Yves Salmon 2005
Septembre 1944. Je n'avais pas encore 9 ans. Nous vivions à la Maison Forestière des Loges, Commune de Monthelon, à 6Km d'Autun et étions dans la crainte et l'incertitude de l'époque. En juillet août, les allemands vinrent à maintes reprises faire des manoeuvres vers notre maison, la prenant pour cible.
Ce mois d'août
44 de nombreux convois allemands remontaient vers l'Alsace encombrant
nos routes sur l'axe Moulin - Autun - Dijon. On trouvait des éléments
de l'armée VLASSOV composés de russes, de mongols
et d'indous. Je me souviens de leur visite à la maison.
Ils prirent le vélo de mon père sous la menace de
leurs fusils.
Le samedi 9 septembre 44, des camions avec fanions arrivent devant
notre maison. Ces hommes aux renues disparates nous assurent que
nous n'avons rien à craindre, ce sont les gars du CFP.
Ils poursuivent les allemands depuis le Sud - Ouest, sous le commandement
du colonel POMMIES ; Ceux - ci sont sous les ordres du Chef de
Bataillon WURSTEISEN, du Capitaine TURBAN entre autres. Ils nous
demande d'entreposer du matériel, ils installent leur popote
roulante, leur camion d'essence et des munitions dans notre cour;
Dans la nuit du 9 au 10 septembre, mon père conduit une
section à traves bois à la Commaille ; Il rentre
au petit matin juste pour évacuer la maison à la
hâte et nous réfugier au Château de Chantal.
Les allemands sont proches. Sous la forte pression allemande,
les CFP reçoivent l'ordre de se replier. Nous ne sommes
plus protégés. Ce dimanche 10 septembre vers 10h.30
le Commandant WURSTEISEN est tué ainsi que le chef JACQUEMIN
à 200m de ma maison. Je suis allé sur les lieux
du combat avec mon père et d'autres personnes les jours
suivants. J'ai assisté à leurs obsèques à
Monthelon et, vu pleurer des soldats autour des cercueils.
Depuis les années sont passées avec le souvenir
de ces évènements gravés dans ma mémoire.
Pourquoi ces deux officiers ont- ils été tués
à la lisière du bois ? et ce sous officier allemand
tué près d'eux ? Qu'est devenu le petit soldat français
blessé à côté du commandant ? Sans
doute est-il reparti chez lui, J'aurais tant aimé le connaître
! Il me faudra attendre le 50e anniversaire de notre libération
pour que je rencontre le petit blessé... C'était
alphonse CARNEADO qui vivait pourtant si près de nous,
à Autun. Je le connaissais, mais j'ignorais son passé
au CFP. Il devint rapidement mon ami, me conduisant tout naturellement
à faire la connaissance de Moïse BERNADOT son sauveur
du 10 septembre 44. Pour ce cinquantième anniversaire,
j'ai proposé à Alphons CARNEADO et à 2 ou
3 de ses amis du CFP de nous rendre sur le lieu de l'affrontement.
Et là, je ressentis une grande honte ! Rien ne signalait
l'endroit de leur dernier combat. C'est ce jour là que
je décidais de placer une croix sur laquelle serait apposé
une plaque. Il fallait agir et rattraper 50 ans d'oubli, de silence,
de négligence. Ce lieu devait porter une marque de respect
à ces braves combattants tombés pour notre liberté.
Aujourd'hui, ma plus grande fierté est d'entendre résonner
le Chant des Partisans et la Marseillaise en présence des
anciens du CFP sur ce lieu de Mémoire si longtemps oublié.
Récit de Georges MENAGER, Etoile noire N° 181,